Le croisement de races en élevage bovin laitier est une pratique minoritaire dans les élevages français, alors qu’il pourrait apporter des solutions intéressantes face au changement climatique, notamment dans des systèmes économes en intrants. C’est pourquoi un croisement rotatif trois voies basé sur les races Holstein (Ho), Rouge Scandinave (Rs) et Jersiaise (Je) a été introduit dans le troupeau de 72 vaches laitières Ho de l’expérimentation système OasYs d’INRAE. Cette expérimentation a pour objectif de concevoir et mettre à l’épreuve un système bovin laitier bas intrants adapté au changement climatique en mobilisant des principes clefs de l’agroécologie. Les leviers retenus imbriquent l’utilisation du croisement trois voies, la répartition des vêlages groupés sur deux saisons (printemps et automne), l’allongement des lactations (objectif de 16 mois, avec des intervalles vêlage-vêlage de 18 mois), la maximisation du pâturage et une très forte diversification des ressources fourragères. Le choix des races à combiner pour le croisement trois voies a été motivé par leurs aptitudes et leur complémentarité : la Rs a été sélectionnée pour ses aptitudes reproductives et la Je pour son format, ses taux et sa résistance à la chaleur. L’objectif de cette étude est de comparer les performances de production laitière des deux premières générations de vaches croisées et des Ho présentes entre 2015 et 2021, en regardant plus spécifiquement l’effet de la génération (Ho vs F1 vs G2) et du sens de croisement (d’abord Rs ou d’abord Je), dans un contexte original de lactations longues. Les croisements de race ont débuté sur OasYs en juin 2013, en inséminant la moitié du troupeau Ho avec des semences de taureaux Rs et l’autre moitié avec des semences de taureaux Je. Les croisées de la première génération (F1) étaient donc Ho×Rs ou Ho×Je. A la deuxième génération, la race complémentaire a été introduite, donnant ainsi des individus G2 (Ho×Rs)×Je ou (Ho×Je)×Rs. Du fait des lactations allongées à 16 mois, chaque vache vêlait alternativement au printemps et à l’automne. Les résultats montrent que sur 70 semaines de lactation, la production laitière (PL) est largement supérieure pour les vaches Ho (11298 kg en moyenne) que pour les vaches croisées des deux générations (8634 kg en moyenne), et que la PL des vaches croisées F1 (9049 kg en moyenne) est plus élevée que celle des vaches croisées G2 (8219 kg). Les taux butyreux et protéique des vaches croisées F1 ou G2 ne sont pas significativement différents mais sont supérieurs de 13% à ceux des vaches Ho. Au final, les quantités de matière utile (MU) ou de lait corrigé produites par les Ho dépassent de 16 % celles des croisées et sont supérieures pour les F1 (735 kg en moyenne) que pour les G2 (687 kg). Chez les vaches G2, il n’y a pas d’effet du sens de croisement sur la PL et sur les taux. En revanche il affecte les quantités de MU et de lait corrigé avec des valeurs inférieures de 9% pour le croisement (Ho×Je)×Rs.